Débat public – Religions et Etat, Quelles relations, quelles rencontres et quels échanges ?

Débat public – Religions et Etat, Quelles relations, quelles rencontres et quels échanges ?

L’introduction de M. Vahid Khoshideh pour la soirée de débat

Au nom de Dieu Tout-Puissant

Ce sont par ces termes que commence la Constitution Fédérale de notre pays, la Suisse. Nous avons la chance de vivre dans un pays démocratique où sa constitution garantit la liberté religieuse.

Pour des raisons historiques, les genevois, ont choisi d’être gouvernés par un état laïque, pour conserver la paix religieuse dans notre cité.

Je parle bien de la laïcité genevoise, car à nos jours, il est difficile d’utiliser le terme de la laïcité sans un adjectif pour la définir. Avoir une définition, ou plutôt une compréhension unique de la laïcité est impossible.

Certes, la laïcité est la séparation entre l’Église et l’État, et je pense que nous sommes tous d’accord sur ce point. Pourtant, les « laïçards », surtout en France, font de la laïcité l’instrument de restrictions religieuses offensives envers les éléments constitutifs de l’identité religieuse en général, et l’identité religieuse musulmane en particulier.

Pour notre communauté, Avec la loi genevoise sur la laïcité de l’État, ce n’est pas le principe de la laïcité qui est mis en cause, mais la manière dont elle est appliquée à Genève.

Jean Jaurès, député français, un des rédacteurs de la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905, écrivait : Démocratie et laïcité sont deux termes identiques. “ La démocratie n’est autre chose que l’égalité des droits.” […] Or il n’y a pas égalité des droits si l’attachement de tel ou tel citoyen à telle ou telle croyance, à telle ou telle religion, est pour lui cause de privilège ou cause de disgrâce.

 

C’est pourquoi, lors du référendum contre la loi sur la laïcité de l’État, nous avons montré notre attachement à une laïcité juste, démocratique, inclusive, non discriminatoire et respectueuse des droits de chacun et chacune. C’est par une telle laïcité que nous pouvons aborder des causes justes et neutraliser le fanatisme religieux.

 

La laïcité ne doit pas être contraire aux droits fondamentaux et contredire l’art 9 de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH) ratifiée par la Suisse, en ce qui concerne la « liberté de conscience et de religion ». Ni l’art. 18 de la Déclaration des droits de l’homme.

La laïcité ne doit pas mettre en cause la neutralité religieuse de l’État, ni le respect des droits du personnel des entités publiques genevoises, ni l’égalité hommes-femmes, ni les droits civiques de ces dernières.

Une laïcité qui viole gravement l’égalité citoyenne en soumettant les un-e-s et pas les autres à des interdits particuliers n’est pas digne de notre cité. Les femmes musulmanes sont en particulier pénalisées par une telle laïcité.

En effet, la loi sur la « laïcité » est une attaque contre les droits des femmes, de confession musulmane en particulier. Elle restreint les femmes portant un voile, dans leur accès à l’emploi dans le secteur public, donnant un exemple désastreux pour l’ensemble du monde du travail. Elle les met face à un choix déchirant et impossible entre leur intégration sociale et leur indépendance financière d’un côté, et le déni de leur identité personnelle et profonde d’un autre.

De plus, un des enjeux centraux de l’égalité entre femmes et hommes est la liberté de disposer de son corps.

Dans le cas de la loi sur la laïcité, c’est un parlement majoritairement composé d’hommes qui a décidé de la manière dont les femmes doivent se vêtir. Toute loi qui vise à réduire l’auto-détermination de certaines femmes est une attaque contre l’ensemble des femmes. ON NE LIBÈRE PAS LES FEMMES EN LES EXCLUANT.

Les femmes, doivent pouvoir faire leurs propres choix. Les partisans de la loi considèrent les femmes portant le voile comme des êtres soumis à un diktat patriarcal, renforçant des stéréotypes sexistes mais aussi racistes. Or, l’État n’a pas à édicter une mesure discriminatoire au prétexte de combattre le sexisme. Il doit au contraire promouvoir l’égalité dans les faits en favorisant l’accès au travail, à la formation et à l’éducation, par des mesures positives, en pénalisant les comportements institutionnels inégalitaires.

L’État est le premier employeur et devrait montrer l’exemple contre les discriminations, notamment en engageant les personnes portant des signes religieux.

Les initiateurs et les parlementaires qui ont soutenu cette loi ont montré leur incohérence. D’un côté, ils font promouvoir l’intégration, la liberté et l’émancipation des femmes, et de l’autre côté, ils font tout pour empêcher les femmes qui veulent conserver leur identité et leur droit à l’autodétermination d’être des citoyennes à part entière dans la société. Certains articles de cette loi visent précisément à enfermer la femme musulmane qui a choisi librement sa tenue. Or, n’oublions pas qu’exclure, c’est vulnérabiliser et marginaliser.

Via la « Charte suisse sur la diversité au travail » signée en 2018, Genève s’engageait pour l’égalité de traitement, notamment concernant les convictions religieuses de ses employés. Un engagement violé par cette loi qui veut « uniformiser » l’apparence des employés au mépris de leurs droits.

La laïcité de l’État doit se manifester dans la neutralité de l’action de ses employés, égale pour tous et toutes, pas dans leur apparence. Cette loi privilégie l’apparence plutôt que la prestation délivrée. Ce qui doit compter, est la compétence, le service au public et l’engagement professionnel de l’agente de l’État, pas la manière dont celle-ci a choisi de se vêtir. Il n’y a aucune raison de penser que le port d’un « signe religieux » puisse nuire à l’universalité du service public.

En portant un signe religieux, les fonctionnaires n’affichent qu’une conviction personnelle, qui ne remet pas en cause la neutralité religieuse de l’État. Au contraire, la diversité des employés, y compris sur ce plan, montre que l’État ne discrimine pas ses salariés.

(Certains prétendent que cette interdiction dans la sphère professionnelle offrirait un espace d’émancipation. Au contraire, en touchant à la possibilité pour ces femmes de gagner leur indépendance financière, on les place en situation de vulnérabilité !)

L’argument que la laïcité protègerait la liberté de croyance par l’interdiction de son expression est absurde.

Jamais une loi qui discrimine et stigmatise une minorité n’a garanti la paix sociale ; bien au contraire, comme le démontre le triste modèle français.

Chacun d’entre nous peut avoir une identité citoyenne, et une identité religieuse en même temps. Nous devons privilégier le dialogue pour enrichir nos connaissances et effacer les préjugés. Notre magnifique cité multiculturelle et internationale doit conserver le vivre ensemble dans la paix et le respect de   l’autre, avec une laïcité démocratique, juste et inclusive.

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